Simon Wasselin : lead narrative designer sur Alan Wake 2
Après 13 ans d’attente, Alan Wake 2 a enfin vu le jour en octobre dernier. Le studio finlandais Remedy a pris le temps nécessaire pour proposer une œuvre artistique unique en son genre. C’est donc avec un immense plaisir que nous avons pu discuter pendant 1h avec Simon Wasselin, le lead narrative designer sur le jeu. Nous sommes revenus sur son parcours et exploré la création du jeu, en nous concentrant notamment sur les éléments narratifs. Cette interview est également disponible sous forme de podcast ici :
Bonjour Simon et merci d’avoir accepté notre invitation à participer au podcast. Pour respecter notre tradition, est-ce que tu pourrais te présenter brièvement pour les auditeurs qui ne te connaîtraient pas ?
Je suis Simon Wasselin, actuellement le lead narrative designer sur Alan Wake 2 chez Remedy Entertainment, en Finlande. J’ai près de seize ans d’expérience dans l’industrie du jeu vidéo. Mon parcours a débuté chez Quantic Dream en 2008 en tant que Game Builder, équivalent du Level Designer. J’ai contribué pendant deux ans à l’édition Move de Heavy Rain avant de m’orienter vers le Game Design, notamment sur Beyond: Two Souls. Mon rôle de lead game designer est arrivé avec le développement de Detroit: Become Human. À la fin de ce projet, j’ai ressenti le désir de découvrir de nouveaux horizons, ce qui m’a conduit à Remedy, recommandé par un ami. Là-bas, j’ai travaillé en tant que senior game designer sur la franchise CrossfireX, un jeu multijoueur asiatique pour lequel Remedy développe des campagnes solo. J’ai passé plus d’un an sur la seconde campagne, me concentrant sur les personnages, les caméras et les mécaniques d’armes, des aspects très différents de mes expériences passées chez Quantic.
C’est alors que Sam Lake, creative director d’Alan Wake 2, est venu me proposer de rejoindre l’équipe en tant que lead narrative designer. Ils ont été séduits par mon bagage sur des jeux axés sur la narration et ont souhaité que j’apporte mes connaissances à ce nouvel opus.
Tu as fais des études en game design qui t’ont notamment amené à travailler un temps chez Quantic Dream en tant que Game Designer sur plusieurs jeux phares du studio. Peux-tu revenir avec nous sur ces 10 ans passés en tant que game designer ?
Après mon baccalauréat, j’ai intégré Supinfogames, rebaptisée depuis Rubika, une école de game design et de gestion de projet. À l’époque, le cursus se concentrait exclusivement sur le game design et la programmation liée à la production. En sortie d’école, cherchant un stage, j’ai eu l’opportunité de rejoindre Quantic Dream qui recrutait des profils juniors. Le travail de Game Builder, assez proche du game design dans la manière de concevoir le jeu et son expérience, se penchait davantage sur les aspects techniques. Pour simplifier, imaginez ouvrir un niveau créé par un artiste et y ajouter des éléments déclencheurs, comme des dialogues ou des cinématiques, pour guider le joueur.
Chez Quantic, cette tâche était très séquentielle, impliquant l’intégration des interactions, des animations, et des caméras dans le jeu pour garantir un flux logique. Au fil du temps, soit parce que les missions étaient moins complexes, soit parce que je devenais plus rapide, j’ai eu l’opportunité d’assister mes collègues et d’avoir une vision plus globale du jeu. Nous étions une dizaine dans l’équipe Game Builder à l’époque, et j’ai souvent apporté mon aide aux autres. Cette expérience m’a permis d’avoir une vue transversale du jeu et j’ai même prêté main forte à l’équipe de design, qui à l’époque ne comptait que deux ou trois personnes. Au fil des ans, j’ai progressivement glissé vers le département Game Design. Après des discussions avec mes supérieurs, j’ai officiellement basculé vers ce département, continuant ainsi mon travail chez Quantic jusqu’à la fin de mon contrat.
Comment s’est opérée la bascule de ton côté pour devenir narrative designer ? Était-ce l’opportunité de travailler chez Remedy qui s’est présentée à toi ?
D’une position de game designer, j’ai évolué vers un rôle plus axé sur le narrative design. Initialement recruté pour me concentrer sur la conception des personnages et des armes, un aspect peu exploré chez Quantic Dream, ce défi s’est avéré captivant. Le travail sur CrossfireX représentait un changement rafraîchissant, surtout en étant responsable de la seconde campagne, reconstruite sur un nouveau moteur pour des avancées techniques. Mon travail a débuté par l’analyse de la version précédente, comprenant la vision du designer initial, afin de la réinterpréter dans la nouvelle version tout en y ajoutant ma propre sensibilité pour garantir le fun et l’équilibre nécessaires. Mon expérience antérieure chez Quantic m’a aidé dans cette transition vers un rôle de junior game designer.
En parallèle, j’ai également apporté mon aide au volet narrative design. Initialement, il n’y avait pas vraiment d’équipe dédiée sur ce projet, du moins au début. J’ai donc contribué sur les aspects techniques et l’intégration, partageant mes expériences antérieures tout en explorant de nouvelles façons d’aborder ces éléments chez Remedy.
Rentrons maintenant dans le cœur du sujet ! Tu es donc le lead narrative designer sur Alan Wake 2, l’un de nos coups de cœur de l’année. L’ambiance y est très présente et la direction artistique donne le ton tout le long du jeu. Sans revenir sur toute la production du jeu, peux-tu revenir sur tes débuts sur le jeu ? Quel était le pitch que l’on t’a donné à ton équipe et toi ?
J’ai rejoint le projet Alan Wake 2 il y a trois ans. À cette époque, le concept était déjà bien défini, avec les personnages principaux établis, notamment Alan Wake du premier opus, tandis que le personnage de Saga offrait davantage de liberté créative. Nous avions des éléments solides pour Saga dans le jeu final, mais certains aspects étaient encore vagues. Durant la première année, avec une équipe centrale composée de level designers, de game designers, de narrative designers, ainsi que des directeurs, notamment Sam Lake pour la direction créative, nous avons travaillé sur un niveau prototype, appelé Proof of Concept. Cette phase a consisté à définir concrètement le jeu sur une mission spécifique, les moyens de créer de la tension et de l’interactivité, façonnant ainsi le design final d’Alan Wake 2.
Les premières discussions se sont focalisées sur le personnage de Saga, agent du FBI, et la possibilité de rendre cette dimension jouable dans un contexte de survival horror, une direction clairement établie dès le départ pour le jeu. Cette orientation offrait un rythme de jeu plus lent, propice à une narration complexe. Notre ambition était de raconter une histoire avec de multiples couches, une intrigue profonde qui captiverait les joueurs.
Notre défi majeur était d’avoir l’attention des joueurs avec des moments de calme, de créer une tension narrative même dans des situations apparemment tranquilles, un aspect crucial pour ce genre de jeu. Nous avons exploré différents mécanismes, notamment l’investigation avec le casse-tête du mur d’indices, pour incarner cet imaginaire de détective, ainsi que le concept d’intuition forte de Saga qui se traduit par des interactions surnaturelles, telles que les interrogations de personnes décédées. Dès le début, une image forte était présente dans nos esprits : Saga face au cadavre de Nightingale, engagée dans une discussion, symbolisant le désir d’interagir avec les morts. Cette vision était fondamentale pour la construction de l’expérience narrative d’Alan Wake 2.
La narration du jeu passe aussi énormément par l’usage des voix off de Saga et Alan tout le long du jeu. Comment avez-vous mis en place ces dialogues internes aux personnages pour guider le personnage sans lui donner toutes les clés de compréhension ?
Le premier Alan Wake était inspiré par Stephen King, et comme nous faisons une suite, nous avons dû reprendre cette inspiration pour rester cohérents dans Alan Wake 2. L’idée était de garder cette narration caractéristique, proche du style littéraire de Wake dans ses écrits, offrant ainsi une immersion spécifique. Cette narration par Alan permettait d’injecter des informations clés, à la fois pour la compréhension de l’histoire et pour guider le joueur dans le gameplay, tout en restant cohérente avec l’univers du jeu.
Dans Alan Wake 2, nous avons continué avec la narration d’Alan. Pour Saga, le personnage était différent. Elle était davantage impliquée dans sa propre aventure, sans la présence d’Alan en tant que narrateur à l’exception des pages du manuscrit trouvées dans le jeu. Nous avons alors introduit le « case board » comme moyen de réflexion. Cela reflétait son approche cérébrale pour analyser les événements, lui permettant de penser à haute voix dans sa tête, une sorte de monologue interne. Ce tableau reflète ses questionnements et déclenche sa réflexion. C’était notre façon de rendre ses dialogues internes plus clairs pour les joueurs.
Saga est un personnage qui prend le temps de réfléchir, elle raisonne à haute voix dans sa tête, articulant ses pensées à mesure qu’elle avance dans l’histoire. Le “case board » joue un rôle important, car il engage le joueur à interagir, tandis que Saga livre des éléments narratifs et des pensées. Cette approche nous a permis d’associer la narration aux actions du joueur plutôt que de la présenter de manière passive comme dans un simple monologue. Ma philosophie en conception narrative implique de placer les dialogues et les éléments narratifs derrière des interactions. J’estime que l’information recherchée à travers une interaction est mieux mémorisée que celle qui est imposée passivement. Bien entendu, dans la pratique, des compromis doivent parfois être faits pour progresser dans l’intrigue, mais mon objectif est de toujours privilégier les interactions pour renforcer l’immersion et la mémorisation des éléments narratifs.
Dans Alan Wake 2, l’histoire, la narration et le gameplay sont tout le temps entremêlés. Sans trop spoiler, tout est question de cycles et de boucles, avec notamment des dialogues qui vont nous guider dans notre aventure. Comment avez-vous travaillé sur le système de dialogue du jeu ? Il est notamment lié à l’avancement de l’enquête de Saga et de l’écriture de Alan pour ouvrir de nouvelles lignes de dialogues.
Dès le début de la conception, nous avons travaillé sur la fluidité du jeu, créant une progression naturelle où chaque action débloque quelque chose d’autre, comme si on tirait un fil pour voir où cela mène. Cela a impliqué beaucoup de tests et de réflexion pour trouver le bon équilibre entre trop d’étapes ou pas assez. Nous avons passé des mois voire deux ans à travailler sur cet équilibre, conscient des contraintes temporelles et narratives pour concrétiser notre vision. Trouver cet équilibre a été un défi complexe. Il a fallu jongler avec différents éléments : le coût des dialogues, impliquant les enregistrements des acteurs et la mise en place de caméras, d’effets visuels, ainsi que les variations de coûts entre dialogues standards et ceux nécessitant des animations faciales et corporelles. Tout cela impacte les délais et le travail de l’équipe.
Le jeu vidéo est une somme de jonglages constants, entre contraintes financières, ressources d’équipe et aspirations créatives. C’est un équilibre délicat entre ce que l’on souhaite réaliser et ce que l’on peut effectivement accomplir dans les limites fixées. Une des approches inédites pour ce projet a été les tests réalisés très tôt, même avec un simple niveau de jeu. Ces essais ont influencé des changements significatifs dans le système de “case board », permettant d’affiner la formule finale. Sans cette phase de playtests, le jeu aurait été très différent.
En ce qui concerne Alan, on est au cœur de l’histoire de la franchise : le créateur contre sa création. Dans cet aspect du gameplay et de la narration, on doit notamment découvrir des indices pour débloquer de nouvelles scènes d’enquêtes et aussi se fier aux pages des manuscrits écrits par Alan Wake pour avancer et trouver des pistes. Comment s’est passée la rédaction de ces pages et de la partie “enquête” d’Alan ?
Pour la rédaction des pages du manuscrit d’Alan, nous avons adopté une approche basée sur les besoins narratifs et de gameplay. Initialement, nous avons identifié les pages nécessaires pour faire avancer le jeu, détaillant les actions que le joueur doit entreprendre. Elles servent de base pour la progression du jeu. En plus de ces pages essentielles, nous avions une série d’autres pages qui complétaient l’univers du jeu. Elles étaient destinées à explorer des éléments narratifs ou à introduire des sujets qui ne pouvaient pas être abordés directement dans les dialogues. Ces pages représentaient des informations cruciales qui ne trouvaient pas leur place dans les interactions classiques du jeu.
Une partie intégrante de cette approche a été l’utilisation des pages pour façonner les dialogues des ennemis, qui étaient tirés directement des écrits d’Alan. C’était une manière pour nous de montrer l’influence de l’histoire sur eux, justifiant qu’ils répètent ces phrases spécifiques. Cependant, pour le livre Initiation d’Alan, nous n’avons pas rédigé de pages spécifiques. L’idée était qu’au début, pendant cette phase, Alan écrivait le manuscrit, donc dans cette phase, le joueur vit ce que fait Alan alors qu’il est en train d’écrire. Même à la fin du jeu, le manuscrit final n’est pas présenté sous le titre « Initiation » ou autre, car cela reste un aspect du processus d’écriture non explicité dans le jeu.
Nous avons surtout abordé l’aspect enquête et les dialogues du jeu, mais le narrative design ne s’arrête pas là du tout. Avec Alan Wake 2, on est sur un jeu riche en références, influences et surtout en détail. On sent que Remedy est en pleine confiance en laissant la caméra libre au joueur qui va trouver des informations absolument dans les moindres recoins du jeu. Je pense notamment au New York cauchemardesque de Wake, qui est une sorte de testament sur la vanité du capitalisme. On retrouve de nombreux graffitis s’adressant à Alan Wake, des affiches mettant l’histoire encore plus en abîme. Peux-tu revenir avec nous sur la créations de tous ces éléments et la manière dont ils s’imbriquent dans la narration principale ?
La construction du monde dans Alan Wake 2 a été une démarche minutieuse, basée sur la compréhension que le monde des ténèbres est un reflet du subconscient d’Alan. Cela a été établi dès le début du processus de conception. Un exemple concret est le niveau du métro, où nous avons dû recréer des panneaux et des textes typiques du métro new-yorkais tout en évitant les problèmes liés aux droits d’auteur. Pour cela, nous avons saisi cette opportunité pour insérer des messages parlant directement à Alan, intégrant ainsi ces textes dans le jeu. Concernant les graffitis, nous savions qu’ils étaient essentiels pour donner vie à la ville. Des membres de l’équipe ont créé eux-mêmes plusieurs tags, puis notre équipe s’est tournée vers des artistes spécialisés dans le street art pour créer ces œuvres. Ils ont créé d’authentiques graffitis, qu’ils ont photographiés afin de capturer la texture et les nuances de la peinture. Ils ont également créé des comptines à la craie sur le parking du Remedy. Cette approche artisanale a ajouté une dimension authentique au jeu.
En ce qui concerne les détails narratifs disséminés dans le jeu, tels que les journaux manuscrits ou les notes écrites à la main, nous avons également pris le temps d’apporter une touche réaliste. Ces éléments ont été rédigés manuellement par nos équipes internes, avec une attention particulière portée aux différentes écritures pour créer une variété d’identités visuelles. Cela entre dans ce que nous appelons une « réalité sublimée », où l’objectif est de rester proche du réel tout en conservant une esthétique artistique, facilitant ainsi la lisibilité pour le joueur. Tout dans le jeu, qu’il s’agisse des écritures manuscrites, des dessins, des graffitis ou même des croquis d’enfants, a été réalisé avec une approche détaillée. Par exemple, des dessins ont été réalisés au crayon, certains par Sam lui-même ou par un artiste dédié. Même les dessins à la craie sur le parking ont été créés puis photographiés pour obtenir la bonne texture dans le jeu.
Comme nous le disions, le concept de la boucle, du cycle est au cœur du récit. C’est un concept proche de ce que d’autres œuvres mettent en place avec les univers partagés, comme Everything Everywhere All at Once pour notamment aborder le regret. Alan Wake est habité de doutes, de remords et regrets durant le jeu et cela se traduit de plusieurs façons dans le gameplay et la narration. Comment avez-vous travaillé la psychologie du personnage pour la faire ressortir sur son environnement ?
Le thème central de la boucle et de la culpabilité est profondément ancré dans Alan Wake 2. Alan, tourmenté par ses erreurs, est confronté à des dilemmes intérieurs. Dans le premier jeu, ses choix ont conduit à des conséquences difficiles, comme sauver quelqu’un au prix d’un sacrifice personnel, le laissant coincé dans un monde étrange pendant treize ans. Ce sentiment de culpabilité est une partie essentielle de son récit.
À la différence de Saga, qui est confrontée physiquement à des menaces, Alan est plus influencé par la psychologie. Il se retrouve dans un environnement où la frontière entre réalité et illusion est floue. Les ennemis qu’il affronte ne sont pas toujours ce qu’ils semblent être, représentant davantage ses propres angoisses intérieures que des menaces tangibles. Ce jeu autour de la confusion entre ce qui est réel et ce qui ne l’est pas reflète sa lutte contre la culpabilité et le doute constants. Alan est contraint d’écrire pour échapper à cet état, persuadé que la rédaction d’événements dramatiques ou horrifiques stimule l’environnement qui le retient. Ce conflit interne, où il doit nuire à d’autres pour se libérer, est une composante que nous voulions que les joueurs ressentent, une immersion dans les tourments du personnage. Pour moi, l’expérience d’Alan a été plus dirigée par une vision très précise dès le départ. Sam Lake avait une vision claire de ce qu’il souhaitait et notre travail a consisté à la matérialiser. Cela nous a offert moins de marge de manœuvre créative par rapport à d’autres projets, mais cela a permis de concentrer nos efforts sur la réalisation de cette vision spécifique.
Alan Wake 2 est un jeu qui transpire d’amour pour ses influences, sans jamais virer dans l’hommage pur et simple. Pour en citer quelques-uns, on pense notamment à David Lynch et surtout Twin Peaks, True Detective, Seven mais aussi des œuvres de folk horror moderne comme Hereditary ou Midsommar jusqu’à l’ambiance de Fargo. Comment avez-vous fait le choix des influences avec le studio et comment cela s’est-il ensuite traduit dans la narration ?
Dans le processus de conception d’Alan Wake 2, nos inspirations n’étaient pas des modèles stricts à suivre, mais plutôt des références qui ont servi de langage commun au sein de l’équipe. Nous avons abordé des concepts et des relations entre personnages en utilisant des exemples comme Fargo ou True Detective pour établir des points de comparaison. Ces références étaient des repères pour définir le ton et l’atmosphère sans être des modèles immuables. L’inspiration majeure derrière notre travail provient de nos besoins immédiats pour le jeu. Sam Lake et Clay Murphy ont réfléchi à ce qui fonctionnerait le mieux pour l’écriture, tandis que l’équipe cinématique se penchait sur les besoins spécifiques pour les scènes. Chacun a contribué à sa manière, mais cela n’a jamais été une question de reproduire des œuvres précises.
Nous avions cette idée d’une petite ville américaine, inspirée par des références comme Twin Peaks ou Fargo, mais nous n’essayons pas de recréer ces univers exactement. Notre objectif était plutôt de laisser le jeu dicter ses propres besoins. C’est un processus délicat car il faut être suffisamment préparé en amont tout en étant capable d’ajuster et d’adapter en cours de route pour correspondre à l’expérience recherchée. L’une des difficultés majeures a été de synchroniser l’histoire écrite avec son exécution dans le jeu. Parfois, même une excellente histoire sur le papier peut ne pas fonctionner aussi bien une fois intégrée au gameplay. Cela nous a poussé à réévaluer à plusieurs reprises la distribution des informations au joueur pour s’assurer que le récit se déroule de manière cohérente et engageante.
Comment s’est passé le travail au sein de ton équipe ? Tu avais 6 personnes avec toi, comment se passaient vos journées et comment le travail et la création étaient-ils répartis entre vous ?
Nous avions une équipe de 6 personnes, dont 3 se consacraient à l’écriture de scénarios narratifs. Nous avions également un membre technique responsable des systèmes permettant cette intégration. Une autre personne se concentrait sur comment préparer les séquences d’enregistrement live, tandis qu’un membre à temps plein s’occupait principalement du contrôle qualité, un élément crucial dans le développement du jeu.
L’intégration des dialogues impliquait bien plus que simplement les placer dans l’environnement. Cela demandait une gestion minutieuse des timings et des interactions possibles du joueur. Par exemple, si un personnage se déplaçait d’un lieu à un autre en discutant, il fallait que cette conversation se déroule de manière fluide, même si le joueur marchait, s’arrêtait ou courait. En plus des dialogues, nous avions d’autres éléments narratifs à intégrer, comme les dioramas. Ces éléments, comme l’examen du corps de Nightingale, étaient essentiels pour l’expérience narrative du joueur. Cela inclut des éléments visuels, des vidéos ou des radios disséminés dans le décor, offrant des éléments narratifs supplémentaires, enrichissant ainsi l’histoire globale du jeu.
Et comment interagissais-tu avec les autres départements pendant la production ? Y avait-il une équipe en particulier avec laquelle tu travaillais le plus ?
Avec l’équipe de rédaction, nous avons travaillé intensivement, partageant une salle pour une communication plus fluide et plus efficace. L’audio a été une autre équipe clé, notamment pour s’assurer que les dialogues s’intègrent harmonieusement dans le paysage sonore sans dominer les autres aspects. Notre interaction avec l’équipe cinématique était cruciale pour intégrer les dialogues dans les séquences et l’environnement, veillant ainsi à une variété de storytelling et de maintien narratif.
Nous avons également beaucoup travaillé avec l’équipe artistique, surtout pour les objets et les props. Nous avons travaillé main dans la main avec eux pour intégrer des éléments tels que des lettres, des journaux intimes, des affiches, etc. dans le jeu d’une manière qui soit cohérente avec l’histoire. Il y a aussi eu une forte collaboration avec l’équipe UI pour s’assurer que les informations affichées à l’écran étaient correctes et bien synchronisées avec l’expérience utilisateur. Cependant, ces collaborations n’étaient pas sans défis. Il y avait des contraintes techniques, comme l’accessibilité et la visibilité des éléments à l’écran, ainsi que des ajustements pour améliorer les temps de chargement et rendre l’expérience plus fluide pour les joueurs.
Maintenant que le jeu est sorti, et on espère qu’il aura le succès qu’il mérite d’après nous, quels sont les prochains projets pour toi ?
Alors la suite de manière très très court terme, c’est qu’on continue de travailler sur Alan Wake 2. On a sorti quelques patchs et on va continuer. À titre personnel, je ne serai plus dans l’équipe Alan Wake 2 d’ici quelques mois. Je discute sur quelles vont être les prochaines étapes et projets avec Remedy.
On remercie une nouvelle fois Simon de sa disponibilité et Remedy pour nous avoir fait confiance !
2 Commentaires
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