Assassin’s Creed à un (M) Virage ?
Le vent souffle, les dunes grondent, le sable chante, et la douce mélodie des critiques qui accompagnent la sortie d’un Assassin’s Creed remonte à nos oreilles.
« C’était mieux avant, Ubisoft a oublié les premiers joueurs, le virage RPG a tué la licence. »
Loin de moi l’idée de vouloir contredire cette frange de la communauté. Le fait est que les épisodes Odyssey et Valhalla, respectivement sortis en 2018 et 2020, ont entamé une vraie déconnexion entre les fans de la première heure et les nouveaux venus, bien que cette scission ait déjà commencé à opérer dès Origins.
Le studio fondé par Yves Guillemot a peut-être oublié ce qui faisait la promesse initiale d’Assassin’s Creed : un jeu centré sur la secte des Assassins, qui met en place une infiltration sociale, des combats grisants et une plongée dans un contexte historique bien précis. Ces éléments se sont peu à peu évanouis dans le sable, au profit de la sacro-sainte formule RPG, qui a pris de plus en plus de place.
Le but n’est pas de dire ici que c’est une mauvaise chose. Si cette formule RPG a marché par le passé, et marche encore d’ailleurs, c’est qu’il y a une bonne raison. L’objectif serait plutôt de se questionner sur le pourquoi d’un tel retour aux sources six années après la sortie d’Origins.
Car, oui, dans ce contexte plus que compliqué pour Ubisoft, aussi bien créatif qu’au niveau de sa hiérarchie, nous arrive Assassin’s Creed Mirage. Les premiers trailers nous laissent presque entrevoir un remake du premier opus. Voilà la promesse d’un vrai retour aux sources, mettant l’emphase sur le parkour, l’infiltration et l’exploration d’une seule ville.
Alors cette promesse est-elle tenue, où est-ce encore une illusion, un mirage qu’Ubisoft agite devant nos yeux de fans nostalgiques ?
Présent désertique
Évacuons directement ce qui est un grain de sable dans la chaussure d’Ubisoft depuis bien trop longtemps: la métahistoire. Assassin’s Creed est une licence dans laquelle vous êtes projetés dans le passé par le biais d’une machine nommée Animus. C’est via cette narration ancrée dans le présent, pilier des premiers opus, que l’on incarne de multiples protagonistes à travers le temps.
Si ce dernier a quelque peu repris ses lettres de noblesse avec Valhalla, ne vous attendez pas à ce que cet opus continue de raviver la flamme. Le tout est extrêmement sommaire et commence par une courte introduction de William Miles arguant que les mémoires que vous allez vivre ont longtemps été cachées, mais on ne comprend pas vraiment pourquoi ni comment.
Même pas de protagoniste pour entrer dans l’Animus, un semblant de mise en contexte, rien, ce qui paraîtrait profane à certains fans de la licence. Mais qu’importe, je le disais cela fait bien longtemps que cet aspect n’est plus le sel de la franchise, et le joueur que je suis ne veut qu’une chose : être rapidement plongé dans la Bagdad du IXème siècle pour y trancher des gorges à coup de lame secrète.
Mise en scène réhydratée
Vous incarnez donc Basim, jeune voleur à la tire qui tente maladroitement d’attirer l’attention de Ceux qu’on ne voit pas, les Assassins Old-Gen. Pour ceux qui auraient loupé l’épisode Valhalla, Basim est également Loki, le Dieu Nordique (ou Isu dans cet univers), et le jeu va d’ailleurs jouer sur cette dualité pour en tisser un fil rouge tout au long de l’aventure. Ça n’ira pas bien loin et donne un peu l’impression d’être posé là comme une excuse du genre « Regardez on en a quand même parlé ! », mais l’ambiance de ces clins d’œil appuyés fait son effet.
Chose qui m’a profondément marqué dans ces premières heures, Ubisoft (et en l’occurrence Ubisoft Bordeaux derrière cet opus, cocorico) semble enfin avoir compris qu’un dialogue dans un jeu vidéo, ce n’est pas juste poser deux personnages face à face avec une ligne de texte.
On a enfin droit à une vraie mise en scène, les personnages sont beaucoup moins statiques, se déplacent pendant les discussions, les plans de caméra sont plus variés. Un jeu comme The Witcher 3 le montre bien, un dialogue avec une belle musique derrière, ça change tout, et Ubisoft Bordeaux semble avoir mis du cœur à l’ouvrage pour nous immerger dans cette histoire. La faute aussi à un moteur qui, bien que très vieillissant, est maintenant parfaitement maîtrisé.
Le jeu est beau, oui, magnifique même, et Ubisoft reste le maître absolu de la reconstruction historique. La ville de Bagdad est plus vraie que nature, vivante, et nul doute qu’elle pourrait tout aussi bien être utilisée dans un but éducatif, comme ce fût le cas par le passé de la licence d’ailleurs.
Pour ce qui est de la technique, si le jeu se trouve être très stable et quasi exempt de bugs en comparaison de ses prédécesseurs, il souffre de la comparaison avec les standards Next-Gen d’aujourd’hui. La faute je le disais au moteur Anvil qui ne fait plus le poids (les animations faciales sont toujours aussi datées que dans les dernières productions)
Scénario dans les sables mouvants
On appréciera de vivre (et ça faisait un moment que cela n’était pas arrivé) les débuts de Basim et sa progression parmi les Assassins. Il sera par la suite chargé de traquer les membres de l’Ordre des Anciens (la version boomer des Templiers), dans un scénario qui vous prendra une vingtaine d’heures, et qui ne tutoiera jamais les sommets, tout en m’ayant fait passer plutôt un moment agréable.
Le souci, c’est que tout ça est un peu fade, sans surprises. Basim est un personnage qui manque cruellement de profondeur, de nuances, et quel dommage quand on connaît son histoire personnelle. Cette double personnalité, liée à l’influence de Loki, aurait pu/dû être l’occasion de plonger dans sa psyché, ses doutes, ses colères. Et ce n’est que dans son dernier quart que ce scénario va commencer à s’envoler, mais de mon point de vue, bien trop tard.
Le constat est malheureusement le même quand on en vient à parler des personnages plus secondaires, et notamment les cibles. Une légère introduction de trente secondes vient introduire un background, et pouf vous l’oubliez aussi vite que vous l’assassinez. Il aurait été judicieux de développer plus encore l’influence de ces cibles sur Bagdad, afin d’impliquer le joueur dans les actions de Basim.
Ubisoft Bordeaux vient aussi d’une certaine façon relancer un pseudo-débat autour de la longueur des jeux. L’un des principaux points négatifs qui était pointé au sujet de Valhalla était sa durée de vie démesurée, avoisinant les 60 heures en ligne droite. Dans une année 2023 particulièrement chargée, et un mois d’Octobre en forme d’embouteillage, il était de bon ton de proposer une aventure d’une trentaine d’heures maximum. Ne soyons pas naïfs non plus, ce n’est pas forcément un vrai choix d’Ubisoft, dans la mesure où Mirage était à la base pensé pour être un add-on de Assassin’s Creed Valhalla
Et ce n’est pas que les joueurs en ont marre des longs jeux, mais plutôt qu’ils souhaitent que les heures passées dessus soient qualitatives. Tout le monde n’a pas le talent d’un CD Projekt avec The Witcher 3, ou Bethesda avec Skyrim, capables de conserver un niveau de qualité constant sur des aventures d’une centaine d’heures, et en rendant le tout profondément addictif.
Le propos est peut-être pour Ubisoft, d’accepter que ce n’est tout simplement pas dans sa veine, que son talent est ailleurs, et si Mirage peut en quelque sorte lui faire ouvrir les yeux, tout le monde en sortira gagnant.
L’oasis de l’infiltration
Bon, on sait tous pourquoi vous êtes là, vous avez envie de savoir si l’infiltration est vraiment de retour. À ma grande surprise, et alors qu’elle n’était qu’une étiquette agitée devant le fan nostalgique dans Valhalla, Ubisoft Bordeaux ne s’est pas moqué de nous et propose un titre pensé autour de l’infiltration.
Cette notion n’est plus simplement un argument commercial, mais la clé de voûte de son gameplay. Tout dans Mirage est tourné vers cet objectif : vous pousser à rester discret. En premier lieu, les ennemis, qui une fois que vous serez repéré se montreront agressifs, nombreux, et videront votre barre de vie en quelques coups.
Au-delà de ça, on sent ce désir de faire de cet opus un jeu doudou, dans lequel vous prenez votre temps et profitez de l’ambiance de la ville. Basim est volontairement très lent, le jeu reprend les animations lourdes et organiques de Valhalla, mais cette fois parfaitement adaptées à ce que le jeu veut proposer.
Le parkour est VRAIMENT de retour, et ceci est évidemment le fait d’une aventure se déroulant dans une ville unique, Bagdad, chose qui n’était pas arrivée depuis les épisodes Unity et Syndicate. Vous me verrez sans doute refaire des allusions à Unity, tant la philosophie de cet épisode semble s’en rapprocher (ça tombe bien, c’est mon Assassin’s Creed préféré).
Finies les landes interminables de l’Angleterre, Bagdad est profondément verticale et vous invite sans cesse à évoluer sur ses toits. Il ne se passe pas vingt mètres sans que vous croisiez un palan qui vous propulsera vers les hauteurs. Ce qui ne veut pas dire qu’il ne faudra pas descendre parmi le bas-peuple de temps en temps, ne serait-ce que pour visiter les souks et convaincre un marchand récalcitrant.
Car oui, l’infiltration sociale fait également peau neuve : s’asseoir sur un banc pour écouter une conversation, entamer une filature ou se cacher parmi la foule, accompagné d’une animation très efficace et discrète. Cette infiltration sociale repose sur un système de jetons, que vous glanez au gré d’une mission secondaire ou en détroussant un passant fortuné. Jetons qui pourront alors être utilisés pour vous attacher les services d’un marchand ou soudoyer un crieur public.
En effet, un système de notoriété est également de la partie : si vous vous faites attraper en train de voler, ou que vous assassinez des gardes en plein jour, votre réputation monte. À partir du niveau 2, les gardes commencent à patrouiller sur les toits, ce qui risque de fortement compliquer vos déplacements. Comme à l’époque, vous pourrez alors arracher les avis de recherche sur votre tête pour vous tirer de ce mauvais pas.
J’ai trouvé toutes ces mécaniques très judicieuses, et globalement je n’avais pas senti un Assassin’s Creed aussi cohérent dans ses systèmes de jeu depuis Unity. La passerelle avec cet épisode est toute faite, puisque Mirage reprend la mécanique des assassinats Black Box, avec plusieurs opportunités d’infiltration qui se présentent à vous. Plutôt soudoyer le cuisinier pour qu’il vous ouvre une porte fermée ou engager des mercenaires pour distraire les gardes ?
Malheureusement, l’approche est beaucoup moins profonde et mènera de toute façon toujours au même résultat et à un assassinat très scripté. Mais je me suis quand même surpris plus d’une fois à me préparer avant une séquence assassinat, en refaisant mon stock de couteaux ou en remplissant une petite mission secondaire qui me rapporterait des jetons. Jetons que je pourrais ensuite réinvestir pour faciliter l’assassinat de ma cible.
Merci donc à Ubisoft Bordeaux, d’avoir réussi à me faire ressentir des choses que je n’avais pas ressenti depuis plus de dix ans dans un Assassin’s Creed. Même si tout n’est pas parfait, ce sentiment palpable d’incarner un Assassin, qui planifie ses assassinats, est bien présent.
L’aridité du Lite-RPG
Je parlais à l’instant du système de jetons et de mon stock de couteaux. Parfait puisque ça va me permettre d’embrayer sur l’aspect outils et gadgets à votre disposition. Cela vient bien sûr brosser les fans dans le sens du poil, mais les couteaux de lancer et les bombes fumigènes sont de retour, accompagnés de leurres sonores et de pièges explosifs.
Si la montée en progression de ces outils est plutôt bien gérée, puisqu’il vous faudra les améliorer pour qu’ils se montrent vraiment efficaces, je trouve qu’ils ont tendance à trop faciliter l’approche discrète. Seuls, les couteaux et les bombes fumigènes auraient très bien fait l’affaire, et des outils comme les fléchettes soporifiques viennent simplifier une infiltration qui se suffisait amplement à elle-même.
Tout comme le pouvoir, obtenu rapidement par Basim, lui permettant de se téléporter en un rien de temps d’une cible à l’autre. Hérité de la feature d’assassinats enchaînés dans Odyssey, ce pouvoir fera grincer des dents les réfractaires à toute forme de fantastique dans Assassin’s Creed. Je leur donnerai en l’occurrence raison, tant cela vient là encore gâcher une infiltration qui n’en avait absolument pas besoin
Et chose incroyable, mais c’est en partie grâce à une IA que j’ai trouvé, POUR UNE FOIS, convaincante. Les gardes sont plutôt insistants et réactifs, réagissent aux cadavres de leurs collègues laissés sur le chemin, ce qui m’a poussé à les dissimuler le plus souvent possible. Les développeurs ont poussé le détail tellement loin, que si vous volez un objet à proximité d’un garde, ce dernier vous entend et vous êtes repéré.
Les ennemis peuvent alors vous pourchasser très longtemps, et en fonction de votre notoriété, les passants pourront les alerter et se masseront devant vos avis de recherche, ajoutant à l’immersion et la cohérence.
Je vous rassure, cela reste un Assassin’s Creed, donc on a toujours des situations assez cocasses où vous assassinez un garde à deux mètres d’un autre sans qu’il vous entende, ou des moments où vous allez siffler 5 gardes à la suite dans le même tas de foin.
Pour ce qui est de l’aspect RPG à proprement parler, Mirage reprend l’approche entamée avec Valhalla, qui s’inspirait déjà de ce que faisait Unity, à savoir un Lite RPG réduit au strict minimum. Les armes et équipements, plutôt rares, s’amélioreront jusqu’à 3 fois en fonction de vos ressources. Simple, certes, mais largement suffisant.
J’ai également grandement apprécié de voir disparaître tout système de leveling : vous gagnez toujours des points de compétence, mais votre réussite n’est plus conditionnée par le fait d’avoir 10 niveaux de plus ou de moins que l’ennemi. Il y a bien toujours un indicateur de menace en fonction de la région, mais il est discret et vise simplement à ne pas vous faire aller trop tôt dans le centre de Bagdad (bien que ce soit tout à fait possible).
Votre aigle, présent depuis l’épisode Origins, n’est plus un drone radar invincible, même s’il permet de nouveau de marquer les ennemis depuis les hauteurs. Dommage car j’aurais aimé que le jeu aille au bout de son propos, et choisisse comme Valhalla d’en faire un simple moyen de repérage mais sans marquer les cibles et ajouter des icônes de partout.
Car s’il y a bien un élément hérité de la nouvelle formule et dont Mirage n’arrive pas à se débarrasser, c’est l’omniprésence de son ATH. À tel point que je vous invite à vous ruer dans les Options du jeu, pour y retirer tout ce qui n’est pas indispensable : indicateur de points de compétence, pop-up de fenêtres de récompenses, de ressources, ou de base de données.
Ah, ça y est vous pouvez vraiment apprécier la beauté de Bagdad. C’est mieux non ?
Bagdad j’en suis (Ali) baba
L’un des points qui me manquait le plus ces dernières années dans Assassin’s Creed, c’était la Base de données. Une vraie base de données, hein, pas un speech de trois lignes comme dans Valhalla, ou le Discovery Tour de ces récents épisodes (bien que je n’ai rien contre cette feature soit-dit en passant).
Mais dans Mirage, la quête de savoir ne se fait pas via un bouton dans le Menu Principal, elle est directement intégrée à l’univers du jeu, via des petits fragments que vous pourrez ramasser, et qui vous en apprendront plus sur le lieu visité. Je n’ai donc pas boudé mon plaisir en passant le plus clair de mon temps à dévorer tous ces éléments d’histoire, et des descriptions particulièrement riches, toujours accompagnées d’une image d’illustration : un artwork du studio, ou même directement des photos issues de divers musées.
Ce qui transpire dans Mirage, c’est ce respect absolu de l’époque qui est traitée, et de la culture qui lui est associée. Je tire mon chapeau au studio d’avoir par exemple proposé un doublage entièrement en Arabe, qui est personnellement la version que j’ai choisi de jouer, tellement plus immersive.
Quand sur des versions preview du jeu, les joueurs regrettent de voir des dialogues se déclencher pendant la prière, le studio réagit et règle immédiatement le problème. On sait tirer sur Ubisoft quand il le mérite (et on a pas fini), il faut aussi savoir dire quand des choses sont bien faites, et même très bien faites.
Au-delà de ça, c’est vraiment l’approche très intra-diégétique de Mirage qui a retenu mon attention. Si on oublie deux secondes l’ATH envahissant, on sent que tout a été pensé pour s’inscrire dans une certaine cohérence d’univers, et le tableau des quêtes en est l’un des principaux témoins.
S’éloignant du classique « Panneau de Cibles » des épisodes Odyssey et Valhalla, AC Mirage opte pour une approche qui m’a plus fait penser au journal d’aventure d’un Deathloop, se dévoilant au fil de vos enquêtes, et partant dans plusieurs directions. Vous vous en doutez, ça n’atteindra jamais la profondeur d’un tel jeu, mais ça vous laisse le choix de faire les choses dans l’ordre qui vous sied. J’apprécie le mouvement, et la tentative.
À côté de ça, le système de compétences fait lui le strict minimum et dispose de trois branches dans lesquelles vous pourrez dépenser vos points : Fantôme, Ingénieux et Prédateur. Là encore, très simple, et cela ne fera pas grandement évoluer votre façon de jouer. (Infiltration, infiltration, infiltration)
Qu’en est-il du contenu annexe ? Mirage reste dans le très classique mais vous propose plusieurs choses : des missions d’assassinat, déconnectées de la quête principale, sur lesquelles j’ai apprécié voir le retour des objectifs optionnels, qui vont vous pousser à jouer d’une certaine façon. Assassiner la cible sans être vue, ou en provoquant un accident, ne tuer aucun garde par exemple. Une approche Hitmanesque extrêmement bienvenue.
Mirage reprend également le principe des quêtes narratives très courtes de Valhalla, appelées ici Récits de Bagdad, qui vous invitent à rendre service à un PNJ dans le pétrin. Pour le reste, on est sur de la quête aux collectables : livres, artefacts, fragments d’Eden. Rien d’exceptionnel donc, mais un ajout qui viendra vous occuper quelques heures de plus entre deux cibles de la quête principale.
J’ai aussi pris plaisir à effectuer certaines quêtes aux alentours de Bagdad, ce qui vous obligera à sortir de la ville pour y retrouver une ambiance plus désertique, à dos de dromadaire ou de cheval, ce qui fera écho aux bons souvenirs de Assassin’s Creed Origins.
Le Souk des combats
Ce retour aux sources et à une infiltration pure et dure vient malheureusement nuire à d’autres aspects du gameplay. En tête de liste, les combats, qui, bien que très rares, s’avèrent être extrêmement décevants. Le jeu a beau tout faire pour vous pousser à les éviter (on comprend donc pourquoi), il y a bien certains passages de l’histoire principale où le combat sera inévitable. Vous aurez alors droit à des échauffourées très molles, répétitives, et qui donneront un peu l’impression de se battre avec deux mains gauches.
Quel dommage de ne pas avoir repris le système de points faibles initié dans Valhalla (vous pouviez viser avec votre arc des zones lumineuses sur le corps de l’ennemi pour l’étourdir), ce qui aurait permis de dynamiser le tout. Surtout que c’était parfaitement faisable avec les couteaux de lancer.
L’incohérence de ces combats atteint son paroxysme quand vous comprenez qu’une fois entouré de cinq ennemis, il vous suffit de jeter une bombe fumigène pour les assassiner tous à la suite avec votre lame secrète. Croyez-moi quand je m’en suis rendu compte, je suis resté tout bête devant mon écran.
Regrettable, dans la mesure où Assassin’s Creed n’est pas qu’une licence d’infiltration. C’est avant tout un jeu d’action-aventure, dans lequel les combats se doivent d’être un minimum intéressant.
On arrive tout doucement à la fin de notre balade sur les dunes de Bagdad, et si vous avez bien suivi le fil rouge tendu tout au long de cet article, vous avez saisi que j’estime Assassin’s Creed à un virage, un carrefour. Reste à savoir maintenant vers quelle direction la licence va aller.
Capitaliser sur ce que je considère être les bonnes bases mises en place par cet opus, bien qu’imparfait, ou revenir à la classique formule RPG des dernières années ? Ne soyons pas dupes, au vu de la communication d’Ubisoft, tout porte à croire que celui qu’on appelle pour le moment Assassin’s Creed Red et qui se déroulera au Japon, reviendra à la formule initiée par le triptyque Origins-Odyssey-Valhalla.
On peut le comprendre, dans la mesure où Valhalla est un carton financier selon Ubisoft, malgré un succès critique mitigé. Remettons cependant les choses en perspective : le succès d’opus comme Odyssey ou Valhalla est-il vraiment le fait de son aspect RPG, ou plutôt celui de la période dépeinte, qu’elle soit Grèce Antique pour l’un ou Angleterre sous occupation Vikings pour l’autre ?
Je le disais plus tôt dans cet article, Ubisoft a montré qu’il n’était pas taillé pour proposer ce genre de monde ouvert RPG d’une centaine d’heures. Mirage dépeint un studio taillé pour des expériences plus courtes, plus cadencées, laissant la place à une mise en scène beaucoup plus poussée, et accessoirement, à moins de bugs.
C’est aussi le fait d’une firme qui ne possède pas moins de vingt mille employés à travers le monde. La coordination que demande un développement comme celui de Valhalla, qui monopolise quatorze studios en plus d’Ubisoft Montréal, est dérisoire en comparaison de Mirage. Quand on en vient à parler de cohérence scénaristique et mécanique d’un opus à l’autre, la question se pose également.
Où est passé le Ubisoft précurseur, celui qui prenait des risques et était une source d’inspiration pour les autres studios ? Celui qui a fait naître des Rayman, Splinter Cell ou Watch Dogs, de vraies propositions, aussi bien artistiques que dans le game-design. De précurseur, il est devenu imitateur, tentant de copier maladroitement une formule qui fonctionne. Ses résultats commerciaux ne devraient-ils pas lui permettre cette prise de risque, plutôt que la recherche du prochain Battle Royale à succès ?
Poussons encore plus loin le curseur de l’infiltration, corrigeons les imperfections, explorons tout l’aspect social que peut offrir une ville vivante comme Bagdad. Je ne trouve pas utopique d’imaginer que les ventes et les retours derrière ce AC Mirage pourraient d’une certaine façon influer dans le bon sens le développement de ses suites. Ubisoft n’était-il pas au final en train d’expérimenter avec ce jeu, de tâter le pouls du fan nostalgique pour vérifier qu’il respire encore ?
Je rêve, pensez-vous sûrement, oui, peut-être que je rêve. Mais n’est-ce pas le fait des Milles et Une Nuits de bonheur qu’Assassin’s Creed aura su me faire passer? Des nuits lointaines…
1 Comment
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Super article. On sent toujours ta patte c’est parfait ! Concernant le jeu, je suis moins gentil que toi mais il est vrai que le jeu reste plutôt agréable à faire malgré ses défauts.
Continue comme ça