Final Fantasy IX : Que le spectacle commence !
Final Fantasy IX (ci-après abrégé FFIX) est venu clore la trilogie PlayStation de la saga aux lettres jumelles avec une audace certaine. Ultime incarnation des obsessions d’un Hironobu Sakaguchi alors au sommet de sa gloire, FFIX replaçait sur le devant de la scène la fantasy médiévale dans sa forme la plus pure, et ce, après les excursions steampunk et néo-futuristes des opus précédents (FFVI, VII et VIII). Pourtant, malgré les différences évidentes en termes de conceptualisation de ces univers fictifs, force est de constater que les expérimentations d’antan ont nourri la modélisation de ce nouveau monde empli de châteaux, monarques et autres chevaliers tout droit sortis de contes de fées. La pollution engendrée par les réacteurs Mako de Final Fantasy VII reflète le brouillard assassin recouvrant les terres de Héra, là où le jeu de cartes Triple Triad de Final Fantasy VIII s’est retrouvé émulé à travers le Tetra Master de son successeur. Plus que jamais, chaque épisode se nourrit des précédents, et plus encore, en puisant dans l’héritage de la saga, de plus en plus conséquent.
En ce sens, FFIX s’impose comme une œuvre somme, le testament de la vision d’un esprit créatif inlassablement hanté par les mêmes obsessions, encore et encore, qu’il tente d’affiner année après année. Au-delà de l’écrin enfantin renvoyant à l’universalité des contes (la représentation 3D des modèles des personnages constitue par exemple un habile amalgame du réalisme de FFVIII et du style SD – Super Deformed – de FFVII), derrière son scénario aux premiers abords manichéen, le jeu se propose d’incarner l’aboutissement d’une réflexion sur le sens de la vie à travers toutes ses contradictions. Fort d’un legs porté par une multitude d’épisodes variés, le jeu offre un chant du cygne retentissant à la trilogie parue sur la première console de Sony (le chant du cygne thématique ne surgissant, lui, qu’à la conclusion du dixième opus, avant que la série de Square Enix n’explore de nouveaux horizons, voilés par le thème de la destinée).
Raconter la tumultueuse et complexe histoire de Final Fantasy IX a demandé la mise en place d’une structure narrative impeccable, servie par un jeu d’équilibriste constant entre liberté et cloisonnement, entre développement du monde (le statu quo ne va cesser d’être bouleversé tout au long des quatre disques originaux) et des personnages. Une minutie que Square se propose de démontrer avant même que la possibilité de sélectionner une « nouvelle partie » ne soit offerte aux joueurs, tandis qu’une vidéo introductive se déclenche en même temps qu’apparaît à l’écran le légendaire logotype de Squaresoft (alors le nom du studio qui développait les Final Fantasy avant que celui-ci ne fusionne avec Enix pour donner naissance à l’entité actuelle).
Cette idée de pré-générique existait déjà dans les jeux précédents, FFVII s’en servait pour mettre en avant les créateurs et l’équipe de développement à l’origine du jeu, tandis que son successeur en profitait pour mettre l’accent sur les personnages principaux de l’aventure qui s’apprêtait à démarrer. FFIX, de son côté, met l’accent à la fois sur son univers, à travers diverses représentations de la nature elle-même, les différents continents et lieux emblématiques que les joueurs vont explorer, tout en présentant les membres principaux de l’équipe de personnages jouables, tous associés à une courte phrase résumant un concept leur étant associé, voire un questionnement ou une philosophie de vie. Par cette vidéo introductive, Squaresoft dévoile l’attention particulière portée au monde que le studio a façonné avec passion, ces fragments de Héra jouant aussi le rôle ludique d’une sorte de « bande-annonce » quant à l’épopée qui s’apprête à surgir, une épopée dont le propos essentiel reste le lien entre l’univers et les êtres qui le peuplent.
Le doute n’est plus permis, la vie, sous toutes ses formes, sera au cœur des réflexions exercées par le jeu, ainsi que toutes les interrogations qui gravitent autour de ce sujet. Et ce n’est pas le titre de la mélodie enchanteresse accompagnant les images diffusées qui viendra contredire cette interprétation, étant donné qu’elle s’intitule « The place I’ll return someday », soit littéralement « L’endroit où je reviendrai un jour », une expression prophétique qui se passe d’explications. Quelques instants plus tard, la vidéo introductive s’achève, il est alors l’heure de sélectionner les mots tant attendus : Nouvelle partie.
Toute histoire doit bien commencer quelque part. Celle de Final Fantasy IX se lance via l’une de ces magnifiques séquences cinématiques ayant fait la renommée du studio. Alors qu’une tempête accable un océan défiguré par la houle, la caméra se concentre sur la traversée tumultueuse d’une frêle embarcation. À son bord, deux figures féminines. Une brusque transition éjecte le spectateur de ce sinistre tableau puis dévoile un nouveau cadre, bien plus serein. Nous voici aux côtés de ce qui semble être une princesse, assise entre les murs d’une immense chambre luxueuse, elle-même caressée par les quelques rayons apaisants de lumière qui profitent d’une ouverture pour venir réchauffer la pièce. Les plans suivants, illustrés par l’envol de la caméra, dévoilent à leur tour un immense château féerique, puis une ville d’inspiration médiévale, suspendue au bord d’une falaise. Soudain, un navire volant fend les cieux, glissant sur une mer de brume, dont l’apaisement forge un contraste saisissant avec l’océan en furie observé précédemment.
Quelques secondes plus tard, nous sommes invités dans les coursives du vaisseau puis, tandis que nous nous faufilons le long d’un corridor lugubre, nous faisons la rencontre d’un jeune homme vu de dos, lequel s’achève d’ailleurs sur une queue de singe élancée. Le personnage passe une porte, immédiatement suivi par cette caméra inquisitrice avant qu’enfin ne se dévoile le tout premier écran jouable du jeu. Enfin, dévoiler est un bien grand mot, étant donné que l’écran en question est plongé dans l’obscurité la plus totale. Joueuses et joueurs prennent le contrôle du mystérieux individu, apparemment un jeune homme, tandis que la seule action possible consiste à se déplacer à travers cet écran de ténèbres.
Ce passage constitue l’occasion idéale de découvrir les contrôles basiques associés au déplacement, sans aucune pression. En effet, l’obscurité environnante ne laissant la place à aucun point d’intérêt mis en avant, si ce n’est le protagoniste lui-même, les joueurs sont obligés de se déplacer pour déceler comment progresser. En cet instant fondateur de l’aventure, à première vue banal, il convient d’appuyer sur le fait que, quelques secondes durant, il n’existe rien entre celles et ceux qui tiennent la manette, et le personnage. Ce dernier n’est qu’une enveloppe anonyme (pour le moment), un avatar dans lequel se projette les joueurs. Le monde n’a aucun de ces contours dessinés. En cet instant, tout est possible. L’histoire à venir n’est, pour le moment, qu’une page blanche. Ou noire, vu la situation.
Cette séquence introductive consiste tout de même à accomplir une action bien précise : raviver la lumière. Ce faisant, nous assistons au symbole de la naissance de cet univers. Les formes se dessinent, tout comme les acteurs de la pièce qui s’apprêtent à être jouée font leur irruption dans le récit. Ces quelques secondes permettent de créer un lien entre les joueurs et leur avatar, qui gagne enfin une existence concrète, grâce à la mention de son nom : Djidane. Lorsque le personnage peut être contrôlé, il est possible soit d’avancer tout droit pour rejoindre une table sur laquelle repose un chandelier, ce qui permet d’allumer la lumière et ainsi d’éclairer la pièce (pour faire avancer le récit), mais il est aussi possible de fouiller le moindre des recoins plongés dans le noir, ce qui permet d’y dégoter une poignée d’objets, voire quelques devises. Une fois la lumière allumée, il ne sera plus possible de se procurer ces avantages. Déjà, le jeu offre quelques petits secrets à même de récompenser les explorateurs, ou plus simplement celles et ceux qui préfèreront sortir des sentiers battus (ici représentés par la ligne droite qui sépare Djidane jusqu’à la lanterne). En allumant les quelques bougies éparpillées sur la table au centre de la pièce, la suite du scénario se déclenche, les ténèbres se dispersant pour laisser place à ce qui semble être un débarras.
Les compagnons de Djidane, alertés par l’éclairage soudain, font alors irruption dans la salle, mais voilà qu’un autre individu assez corpulent débarque de l’autre extrémité de la pièce. Détail loin d’être anodin, il est affublé d’une énorme tête de dragon bleu. La toute première joute de l’aventure est lancée (ce qui renvoie entre autres à FFVII, dans lequel là aussi le premier combat intervenait dès le premier écran du jeu, après avoir fait quelques pas et appris à maîtriser les déplacements du personnage). L’équipe d’alliés contrôlée par le joueur se compose de Djidane bien sûr, mais aussi de ses amis Cinna, Frank et Markus. Le système de combat, exempté de tout tutorial (si ce n’est celui se trouvant dans le livret physique à l’époque présent dans la boîte de jeu), reprend le traditionnel système de tour par tour ATB (Active Time Battle) : chaque personnage dispose de sa propre jauge qui se remplit automatiquement au fil du temps et qui, une fois pleine, permet de sélectionner une action universelle (comme attaquer ou utiliser un objet) ou propre au personnage (dérober un objet, lancer un sortilège, etc).
FFIX, durant ce combat primordial, va exploiter ce gameplay pour développer sa narration. En effet, les membres de l’équipe ont la possibilité, outre d’utiliser une action classique, de réaliser l’action « voler », afin de détrousser leur adversaire. Tous les personnages de l’équipe ayant accès à cette capacité, l’activité de la bande est alors clairement définie : nous avons ici affaire à une bande de malandrins. L’adversaire lui-même, derrière son apparence menaçante, n’est en réalité pas si dangereux que ça, étant donné que plusieurs de ses assauts le voient se casser la figure, comme si tout ceci n’était qu’une mascarade. Il est d’ailleurs amusant que cette idée d’animer une attaque ennemie qui échoue est toujours d’actualité de nos jours, comme nous pouvons l’observer dans un jeu tel que Like a Dragon (RGG Studios, 2020). Dans cet autre jeu de rôle au tour par tour, il est fréquent de rencontrer des ennemis qui se battent à l’aide d’un énorme marteau : certaines de leurs attaques sont vouées à l’échec, étant donné que ces adversaires sont parfois entraînés par le poids de leur arme et tombent à la renverse. Pour en revenir au combat qui nous intéresse, le dragon bleu est, bien évidemment, une peu subtile mascarade, et s’avère être en réalité Bach, le chef de la troupe de voleurs. Car de troupe, il en est clairement question ici, les Tantalas, c’est leur nom, se servant de leurs pièces de théâtre afin de détrousser les plus riches. FFIX prendra à ce titre les traits d’une immense pièce de théâtre, qui va en exploiter, puis en pulvériser, les codes les plus élémentaires, et ce afin de raconter une histoire s’extirpant de l’échelle humaine liée aux personnages, afin d’embrasser un propos tout à la fois universel, mais aussi fortement lié au média lui-même.
Ces quelques minutes de jeu faisant office de prologue inculquent déjà plusieurs leçons aux joueuses et joueurs, ces derniers étant invités à s’investir dans le monde qui s’ouvre à eux, tout en se méfiant constamment des apparences. Djidane semble être un humain, mais alors quid de cette queue de singe ? Cet adversaire à tête de dragon qui enchaîne les assauts, ne serait en réalité qu’un allié un peu bourru ? Et pire, il a fallu explorer une pièce plongée dans le noir pour en dénicher les secrets plutôt que la fouiller une fois la lumière allumée ? Cette thématique sur les apparences rejoint l’étymologie du nom original, japonais, de Bach, qui se prénomme au pays du Soleil Levant Baku. Les légendes japonaises évoquent en effet ce fameux baku, un monde extirpé du folklore chinois, connu pour se nourrir des rêves, songes et autres cauchemars de ses victimes. Pourtant, à l’aube du vingtième siècle, la créature s’est retrouvée associée à un rôle de protecteur, et il n’était pas rare que des enfants s’endorment non loin d’un talisman à l’effigie du baku. Le rôle de Bach, dans FFIX, rejoint cette volonté de protection, le chef des Tantalas étant déterminé à prendre soin des siens, tout comme il sera révélé plus tard dans l’aventure qu’il s’occupait des orphelins qu’il rencontrait (lui-même étant en réalité un orphelin de guerre). Baku peut aussi renvoyer au tapir, l’animal, une bête que les peuples asiatiques associent à la bonne fortune. Et de la chance, Bach en aura bien besoin pour mener son prochain plan à terme, un plan parmi les plus audacieux jamais accomplis : enlever la princesse du royaume d’Alexandrie. Ce que les Tantalas ignorent, c’est que la princesse elle-même, Grenat di Alexandros XVII, souhaite à tout prix fuir le château familial qu’elle ne voit que comme une prison, et ce afin de s’éloigner le plus possible de sa mère, la reine Branet. Tandis que Bach explique son plan à la troupe, le vaisseau-théâtre Prima Vista se rapproche de plus en plus de la capitale, point de départ des événements à venir. Car oui, la troupe des Tantalas navigue sur une mer de brume comme si le monde entier leur servait de scène gigantesque. Une scène qu’ils arpentent sous les traits d’acteurs, alors qu’ils sont en réalité de rusés petits voleurs aux ambitions démesurées. Encore une fois, le jeu sur les apparences est fascinant de maîtrise, un thème fort à propos lorsqu’il est question de masques, de théâtre.
Et de théâtre, il en sera question tout au long du jeu, comme le prouvent déjà les patronymes des compères de Djidane. Il y a donc Cinna, qui tire son nom d’une pièce de Corneille, mais aussi d’un personnage du Jules César de William Shakespeare, tout comme Markus d’ailleurs (Marcus en version originale). Dans l’œuvre du dramaturge, Marcus et Cinna complotent pour faire tomber l’empereur, tout comme le parcours des voleurs dans FFIX les mènera à déchoir la reine Branet de son trône. Le cas de Frank, le troisième compagnon, est toutefois un peu différent. Lors des ébauches du scénario et dans la version originale du jeu, le malandrin ne s’appelle pas Frank, mais Blank, un terme dont la traduction appropriée serait « espace vide », comme si le personnage était une feuille blanche, l’incarnation même de l’imagination servant de carburant aux histoires. Il est possible de déceler des échos de cette idée initiale dans l’apparence finale du voleur, conservée dans le jeu, son corps étant rapiécé, recousu, sans identité véritable, ce qui est plus évident à travers son artwork officiel et les gros plans.
Au cas où ce ne serait pas encore tout à fait évident pour le public, tout le premier acte du jeu s’articulera autour d’une pièce que joueront les personnages, pièce durant laquelle réalité et fiction entreront en collision, dans un ballet rendant hommage aux genres de la comédie et de la tragédie. Les trois unités de temps, de lieu et d’action sont d’abord respectées, puis démantelées, tandis que le scénario met à profit une diversification des points de vue (il sera possible de contrôler Djidane, Vivi ou encore Steiner) en apportant un regard quasi omniscient sur l’histoire. Suite à ce premier acte, les références au théâtre seront légion, parfois de manière comique et anodine comme lors du mariage mis en scène entre Vivi et Kweena bien plus tard, d’autres fois de manière bien plus solennelle comme à travers l’attitude de l’antagoniste principal, Kuja, qui prend le monde pour une immense scène sujette à ses caprices et machinations. N’oublions pas non plus l’accent mis sur les tourments des personnages ou, pour finir, cet incroyable final mêlant une nouvelle fois fiction et réalité, durant lequel Djidane et Grenat se retrouvent durant une représentation. Osons pousser le bouchon jusqu’à la toute dernière image du jeu, révélant la collision des mondes d’Héra et de Terra, comme si fiction et réalité s’associaient pour former un tout inaltérable, carburant des histoires essentielles à nos réflexions, notre évasion et nos émotions.
Avant d’en arriver à cette conclusion, prenons les choses à l’envers et étudions rapidement l’introduction à travers ce nouveau prisme de réflexion. Le premier écran du jeu évoque en réalité un parallèle marqué entre réalité et simulacre théâtral. Voyez cette pièce obscure, seulement éclairée par la présence de la bougie que tient Djidane. Lorsque les joueuses et joueurs prennent le contrôle de l’homme à queue de singe, ce dernier débarque dans l’image par le bas, la caméra est donc à cet instant placée dans son dos, légèrement en hauteur. Le public et Djidane font face à la même direction, le regard orienté vers le haut de la pièce, comme s’ils pénétraient ensemble sur la scène disposée à leur encontre. La pièce représente la scène, tandis que les portes sur les côtés mènent vers les coulisses. Au fond, dans ce qui semble être une remise, il est possible de trouver les objets mentionnés un peu plus tôt, lesquels vont aider au bon déroulement de la pièce telle qu’écrite par Squaresoft. D’abord une potion permettant aux personnages de se soigner en cas de blessures, ainsi que quelques gils, la monnaie du jeu, prêts à être dilapidés auprès des divers commerces et échoppes. Alors certes, la comparaison que vous vous apprêtez à lire est tirée par les cheveux, mais je ne peux m’empêcher de voir dans ces deux types d’éléments (les objets à utiliser et les gils) des réminiscences d’articles nécessaire au bon déroulement de la pièce qui va se jouer, à savoir les accessoires (que l’on peut étendre à l’équipement, armes et armures) ainsi que les fonds indispensables à la tenue du budget d’une représentation. Dissimulés dans l’ombre, ils n’en restent pas moins essentiels au bon déroulé du spectacle.
Ce premier écran incarne l’une des quelques fois où la caméra placera la vision du public au même niveau que Djidane, l’essentiel du jeu exploitant des angles de caméra variés, servant à dynamiser la mise en scène, à établir des compositions mettant en valeurs divers éléments ou panoramas, ou tout simplement à créer l’affordance nécessaire au bon déroulé de l’aventure. Là, les joueurs entrent dans le monde de FFIX au même niveau que le héros, et tous deux affrontent les événements à venir ensemble, liés par un pacte tacite, tels les spectateurs rejoignant les comédiens dans la salle. Dans cette séquence, le premier adversaire sort de la porte de gauche puis, une fois le duel achevé, toute l’équipe pénètre dans la réserve située sur la droite, comme s’il s’agissait de signifier que le groupe va avancer ensemble vers la suite des événements (la droite étant associée à l’idée de progression dans le jeu vidéo, l’exemple le plus flagrant se trouvant dans les jeux de plateformes). Tout le monde est ainsi dans le même bateau et tous, personnages fictifs comme joueurs, vont affronter ensemble cette épreuve à venir : l’aventure de la vie elle-même.
Diverses interrogations vont hanter les pensées des personnages et rythmer leur évolution, des tourments qui vont donner naissance à des pans entiers du game design et des éclats scénaristiques distillés tout au long du jeu. Une réflexion qui va s’insinuer jusque dans le gameplay et le système de progression des personnages, à travers par exemple les capacités renfermées dans l’équipement (qui symbolisent la manière dont nous nous définissons par rapport à notre apprentissage et les choses auxquelles nous donnons de l’importance, ainsi que notre expérience, notre développement et notre maîtrise), mais aussi les relations que l’on forge avec le temps (Vivi et Steiner), la difficulté de trouver un but, une identité, etc.
Sans aller aussi loin, et pour en revenir à cet incroyable premier écran de jeu, celui-ci dévoile déjà une multitude d’informations concernant la philosophie donnant vie au projet, le tout, et c’est essentiel de le souligner, sans jamais se délester d’une efficacité narrative tout aussi maîtrisée que le reste, ce qui offre à celles et ceux qui préfèrent se limiter à un seul niveau de lecture un plaisir de jeu immédiat. Les enjeux sont en effet introduits avec clarté (enlever la princesse), l’univers et les règles le définissant sont installés immédiatement (le cadre médiéval fantastique, les forces en présence), sans oublier la manifestation de quelques mystères à mêmes de rythmer l’aventure (la séquence introductive sous la tempête, la queue de singe de Djidane, seul personnage à en être affublé).
FFIX va conserver cette maîtrise narrative sur l’essentiel des quatre disques, et ce grâce à l’expérience accumulée par la majorité de l’équipe créative aux commandes du développement, qui signe ici une œuvre ayant assimilée et digérée des années de travail sur la saga. Les différentes étapes de la vie vont être auscultées tout au long du scénario, de la naissance au deuil, de la mort à l’apprentissage, de la joie à la tristesse, nos doutes, nos rêves, espoirs et illusions vont alimenter le parcours de protagonistes aussi passionnants que variés, lesquels se révéleront incarner les différentes facettes de l’âme humaine, tout ceci jusqu’à ce que tous s’allient face à ce qui n’est rien de moins que le plus grand adversaire conceptuel jamais croisé dans la saga, une entité qui défie les limites du média, même si ce papier n’est malheureusement pas la place pour en parler. Avant d’arriver à ce point culminant parfois incompris par une certaine frange de joueuses et joueurs, il faut bien débuter cette histoire quelque part. La nôtre s’ouvre dans cette pièce engloutie dans les ténèbres, tandis qu’une troupe de voleurs comédiens se prépare à enlever la fille d’une des monarques les plus influentes du monde connu.
Que le spectacle commence !
Sources :
https://www.finalfantasy.fandom.com
https://www.yokai.com/baku