Accessibilité, utilisabilité, inclusivité : le jeu vidéo pour tous ?
Cet article a été écrit par WTF’UX que nous avions invité sur notre newsletter en mai 2024 ! Nous vous invitons chaudement à découvrir son travail sur sa chaine Youtube ainsi qu’à la soutenir sur son Patreon. Bonne lecture !
Tout le monde est différent. Un postulat simple qui pourtant a tendance à être rapidement oublié. Mais différent en quoi exactement ?
Notre genre, nos compétences physiques et intellectuelles, notre éducation, mais aussi notre orientation sexuelle, nos origines, notre culture, nos phobies, nos handicaps, nos maladies, nos traumatismes vécus et j’en passe…
Et pourtant malgré ces différences la majorité des produits et services mis à disposition ne sont pas automatiquement pensés pour être accessibles par le plus grand nombre.
Cependant : bonne nouvelle ! La société évolue petit à petit et de nombreuses actions sont mises en place pour l’accessibilité au sens large. Des normes PMR pour les bâtiments jusqu’aux W3C (World Wide Web Consortium, organisme de standardisation) pour le web, en passant par l’évolution des lois du travail dès les années 2000 pour agir en faveur de la mixité, de nombreuses actions sont mises en place et le sujet est pris au sérieux.
Il est important de préciser à ce stade qu’en réalité quand je parle d’accessibilité au sens large, je parle de trois aspects de celle-ci :
- L’accessibilité pure et dure : elle traite des aspects discriminatoires liés à l’expérience utilisateur pour des personnes en situation de handicap. Un site web accessible par exemple est un site avec lequel toute personne en situation de handicap peut percevoir, comprendre, naviguer ou interagir.
- L’utilisabilité : qui est la conception de produits ou services efficaces et satisfaisants, pratiques et logiques, et qui proposent une bonne expérience utilisateur en somme.
- L’inclusivité : il s’agit de la diversité et de garantir la participation de tous.tes dans la mesure du possible, peu importe l’éducation, la culture, l’âge, l’orientation sexuelle, etc.
Les trois vont de pair.
Mais maintenant qu’on s’est dit tout ça : concrètement qu’est-ce qui est fait au niveau du jeu vidéo ?
I. Le COVID-19, catalyseur de l’accessibilité
L’importance de l’accessibilité n’est pas un mythe.
Quand on entend souvent dire qu’”après tout, l’accessibilité n’affecte qu’un petit groupe d’utilisateurs.rices”, c’est faux. Environ 16 % de la population mondiale est concernée – soit 1,3 milliard de personnes. Et dans ces 16 % on ne se parle uniquement des handicaps, et donc du besoin d’accessibilité pure. Si on rajoute l’utilisabilité et l’inclusivité, le pourcentage grimpe bien plus haut vu qu’il concerne tout le monde, dont les personnes marginalisées qui souhaiteraient être représentées dans les jeux vidéo !
En parlant de “tout le monde”, revenons deux minutes sur les handicaps parce qu’en réalité, je suis persuadée que vous ne vous sentez pas concerné.e.s alors que vous pourriez l’être. On parle ici de handicaps :
- Visuels : qui concernent aussi bien les daltoniens.ennes que les personnes malvoyantes (vision affaiblie ou aveugle)
- Moteurs : on y regroupe les handicaps liés à l’arthrose, les tendinites, entorses, la maladie de Parkinson, l’atrophie musculaire ou toute déficience motrice
- Auditifs : qui concernent les sourds.es et malentendants.es
- Cognitifs : qui sont des handicaps liés à l’épilepsie, la dyslexie ou encore la courbe de difficulté du jeu
- Neurologiques : qui concernent les individus présentant des conditions neurodivergentes telles que le trouble du spectre de l’autisme et qui peuvent éprouver des difficultés dans les interactions sociales et la communication lors de jeux multijoueurs notamment
C’est vaste. Et ces handicaps peuvent aussi bien être permanents, temporaires ou situationnels. Par exemple :
- J’ai un bras cassé et je ne peux jouer qu’avec une main
- Ou tout le monde dort chez moi, je n’ai pas d’écouteurs et je dois jouer sans son
On peut donc toutes et tous être concernés à un moment ou un autre de notre vie !
Bon, jusque là je pense qu’on est alignés sur le fait qu’effectivement, rendre un jeu accessible semble important. Eh bien figurez-vous que malgré ces statistiques élevées, la priorisation et l’intégration de l’accessibilité comme un élément primordial du game design n’est pas encore une habitude bien encrée. À vrai dire, l’accessibilité a commencé à vraiment faire parler d’elle au moment du premier confinement du COVID 19 qui a poussé un grand nombre de personnes non joueurs.euses à s’initier au jeu vidéo. C’est fou comme la période COVID-19 au final a pu faire bouger pas mal de choses !
On avait déjà vu des jeux comme Uncharted 4: A Thief’s End [2016] mettre à disposition un large panel d’options d’accessibilité suite à des conseils de joueurs.euses atteints de handicaps, ou encore Bordelands 2 [2014] qui ajoute un mode daltonien lors d’une mise à jour du jeu. Et ça remonte même encore à plus loin avec l’arcade Bertie the Brain en 1950 avec son IA accessible à tout le monde peu importe son âge, ses compétences ou sa santé.
Mais ça n’est jamais allé bien plus loin que ça. En tous cas ça n’a pas motivé tous les gros studios de l’industrie à en faire de même et s’imposer l’accessibilité comme une règle de game design.
Sauf que le Covid-19 est passé par là et de plus en plus de joueurs.euses ont remonté les problèmes d’accessibilité liés aux jeux : les gens veulent JOUER ! Et ils le font entendre. Que ce soit dans l’unique but de vendre plus de copies ou par pure empathie envers les joueurs.euses : peu importe. Le fait est que les géants de l’industrie s’y intéressent et tendent à rendre les jeux toujours plus accessibles, inclusifs et ergonomiques (utilisabilité). Et là, on se parle de jeux comme The Last of Us: Part I ou encore de God of War qui ont fait des prouesses d’autant plus spectaculaires sur leur deuxième opus respectifs. Celeste [2018] a aussi rebattu les cartes dans le monde des jeux indépendants en proposant un mode assisté, prouvant à l’industrie que malgré des moyens bien moins élevés qu’un AAA, il est possible de proposer des options d’accessibilité.
Mais alors : qu’ont ils fait réellement ? Ça ressemble à quoi un jeu accessible, inclusif et ergonomique ?
II. L’accessibilité sous toutes ses formes
Dans le jeu vidéo, le métier en charge de l’accessibilité n’est pas encore bien défini et peut varier en fonction des studios. Peu importe l’intitulé exact du poste, l’objectif est d’identifier les différents points sur lesquels le jeu pourrait être plus accessible et inclusif (l’ergonomie étant spécifique aux UX designers) et d’intégrer le mieux possible la réflexion sur ces trois aspects tout au long de la production du jeu vidéo. De la difficulté du gameplay à la compréhension du design, en passant par la diversité des personnages et la facilité de compréhension du HUD, les designers doivent faire en sorte que le plus de joueurs.euses possible se sentent concerné.e.s par le jeu, puissent empatir/s’identifier aux personnages et puissent jouer tout simplement.
Et pour ça, ils vont s’intéresser à différents aspects du jeu. Je vous fait visiter ?
A. Les interfaces
Contrastes entre le texte et l’arrière-plan, taille du texte, choix de la police, quantité de texte affichée à l’écran, position des sous-titres, “screen reader” (ou lecteur d’écran) pour les malvoyants, flexibilité dans les contrôles et couleurs utilisés : il y a un ensemble de règles à respecter pour que les interfaces soient les plus accessibles possibles. Parmi celles-ci, on retrouve :
▶️ Sous-titres, textes et lisibilité
Vous ne pouvez pas jouer avec du son pour quelconque raison situationnelle ? Vous êtes sourds ou malentendants ? Les options du volume et le sous-titrage, c’est la base. Et pourtant, dans le jeu vidéo, personne ne s’est passé le mot jusqu’à relativement tard. C’est notamment ce pourquoi tous les jeux n’ont pas la même manière d’afficher les sous-titres alors qu’il y a des règles simples.
Avoir des sous-titres c’est bien. Mais maintenant par pitié mesdames messieurs les studios, faites en sorte qu’ils soient lisibles ! Les textes d’un jeu, qu’ils soient des titres, des sous-titres ou des descriptions, doivent utiliser une police, une taille et un formatage facile à lire par défaut. Le contraste entre le texte et la UI (User Interface) en arrière-plan doit être suffisamment élevé.
Et encore là, je ne parle que de l’opacité, mais il y a des jeux qui ont même décidé d’afficher des pavés de texte en sous-titre, ou qui font scroller le texte automatiquement. NON MAIS AU SECOURS. Il faut que ce soit court, concis et facilement lisible.
❌ DON’T
✅ DOS
Et pour aller plus loin ? De plus en plus de jeux laissent la possibilité aux joueurs.euses d’ajuster ces paramètres de taille et de police dans les options. Et ça c’est hyper important.
▶️ La clarté des éléments
Bien que toute industrie a pour habitude d’utiliser la couleur pour véhiculer un message, les daltoniens n’auront pas l’avantage de comprendre aussi facilement que prévu. Il n’y a qu’à voir l’exemple de Bioshock : le rouge, orange et vert sont similaires dans les images ci-dessous. Impossible donc pour un daltonien de voir la différence. C’est pour ça que c’est important de s’assurer qu’un maximum d’info soit accompagnée d’un texte ou tout autre moyen de comprendre sa fonction autre que par la couleur.
👁️ Vision d’un daltonien
👁️ Personne sans handicap visuel
Une autre option, est de s’assurer que les couleurs utilisées dans ces interfaces soient distinguables les unes des autres par tous types de daltonisme ou de proposer directement aux joueur.euses de :
- Paramétrer les couleurs de leurs choix : compliqué et long cependant lorsque beaucoup d’éléments se basent sur la couleur
- Proposer des filtres de couleurs en fonction du type de daltonisme et appliquer les palettes de couleurs dédiées automatiquement
Une autre option, est de s’assurer que les couleurs utilisées dans ces interfaces soient distinguables les unes des autres par tous types de daltonisme ou de proposer directement aux joueur.euses de :
- Paramétrer les couleurs de leurs choix : compliqué et long cependant lorsque beaucoup d’éléments se basent sur la couleur
- Proposer des filtres de couleurs en fonction du type de daltonisme et appliquer les palettes de couleurs dédiées automatiquement
▶️ De manière générale
Communiquer une information en utilisant une seule indication, qu’elle soit visuelle ou sonore, ce n’est pas une bonne idée. Chaque élément doit être signalé par plusieurs moyens. C’est le cas des bruits de pas dans Fortnite : les joueur.euses ont aussi bien un indicateur visuel que sonore.
B. La difficulté du jeu
On a tendance à l’oublier, mais le fait de proposer plusieurs difficultés dans un jeu c’est être accessible et inclusif. Eh oui ! Comme quoi on est vraiment toutes et tous concerné.e.s.
Certaines personnes souhaitent faire le jeu en mode histoire, d’autres souhaitent du challenge. On a chacun.e nos propres motivations et on vient pas spécialement chercher la même chose dans un jeu.
On le voit d’ailleurs avec l’exemple de Binding of Isaac où la communauté a créé des mods propres à leurs besoins. Il y a notamment un mod qui permet d’afficher la description des objets en permanence et retirer le côté difficile du jeu; tester, risquer de pourrir sa run et recommencer en n’étant pas certains de se rappeler ce que font tous les objets qu’on a découvert au fur et à mesure des runs précédentes.
Proposer un choix assez large de niveaux de difficulté, inclure des tutoriels compréhensibles et efficaces en début de jeu pour accompagner les joueurs.euses c’est important et ça permet à toujours plus de monde de profiter du jeu.
Cependant certains éditeurs / studios pensent la difficulté spécifiquement pour l’expérience qu’ils souhaitent faire vivre aux joueur.euses. Ils voient le changement de la difficulté comme un coup de massue sur l’expérience globale du jeu et une dénaturation de celui-ci. On y reviendra plus tard.
C. Le mapping des contrôles
Généralement, ce sont des options d’accessibilité indispensables pour les handicaps moteurs.
Les QTE (Quick Time event), par exemple, sont les premiers éléments sur lesquels les joueurs.euses vont vouloir avoir la main : spammer un bouton jusqu’à ce que l’événement soit pris en compte peut être un vrai calvaire pour quelqu’un qui a un handicap moteur. Il est indispensable d’avoir une option permettant – par exemple – de juste maintenir le bouton ou appuyer une fois sur le bouton pour que le QTE soit pris en compte.
Pouvoir activer ou désactiver les retours haptiques ou encore changer tout le paramétrage des contrôles du jeu est très important. De nombreuses personnes n’ont effectivement pas la possibilité d’utiliser certains contrôles, comme par exemple les gâchettes L2/R2 qui demandent un maintient (ou LT/RT sur les manettes Xbox) et qui sont plus compliquées à utiliser que des boutons L1/R1 (ou LB/RB sur la manette Xbox).
D. Les triggers warning
Un des sujets de plus en plus discuté, ce sont les triggers warning. Et trop peu de jeux nous préviennent quant aux sujets sensibles ou traumatisants abordés !
En même temps, c’est difficile. Imaginez un jeu où le déroulement de l’histoire vous mène petit à petit à découvrir le passif traumatisant d’un personnage ou un jeu d’horreur qui vous spoil en amont de ce que vous allez voir comme contenu horrifique. C’est frustrant pour les joueur.euses qui ont envie de se laisser surprendre.
Mais c’est encore plus perturbant pour celles et ceux qui au contraire ne souhaitent absolument pas se confronter à des sujets qui les ont traumatisés ou faire face à des phobies.
Doki Doki Literature Club est un exemple de jeu dans lequel il y a la possibilité de voir la liste complète des sujets sensibles qui vont être abordés. C’est assez pratique, mais ça ne résout pas le problème en amont de l’achat (sauf si vous êtes sur Steam, et en bas de page, on peut avoir quelques infos supplémentaires sur le contenu du jeu définit comme “mature”).
Pour le moment la seule alternative viable et complète à ma connaissance, c’est le site “Can I play that” qui permet de rechercher un trigger warning et de voir tous les jeux qui le contienne ou bien de rechercher un jeu et de voir les triggers warning qu’il contient. Assez pratique avant d’acheter !
E. La diversité des personnages
Voir des personnages de tout genre, âge, origines, handicaps, orientation sexuelle dans un jeu vidéo est important !
Tout d’abord, parce que ça permet de créer une communauté de joueurs.euses bien plus inclusive et accueillante. Mais aussi et surtout parce que tout le monde a envie de se projeter – et surtout de se reconnaître – dans un personnage jouable ! Et si ce personnage est toujours représenté de la même manière, ça exclut pas mal de monde… Hauntya vous en parlera d’ailleurs bien mieux que moi dans son article qui aborde le sujet [Du besoin de diversité et de représentation].
La bonne nouvelle, c’est que, comme le reste, ça évolue. Alors certes, il y a toujours des personnes aigries et loin d’être ouvertes d’esprit qui en font des débats extrêmes et malveillants sur Twitter, mais ça évolue malgré leurs propos et ça fait du bien !
Je pourrai vous parler des personnages féminins et de la communauté LGBTQIA+ qui sont de plus en plus représentés dans les jeux et toute la nouvelle diversité d’histoires qu’ils apportent, un vrai vent de fraîcheur et de nouveauté. Mais ça ne se traduit pas que dans les personnages jouables préféfinis par les studios. Il y a aussi dans le détail de la personnalisation de son personnage qu’on retrouve de l’inclusivité ! C’est le cas de Cyberpunk 2077 qui permet de changer sa voix et son sexe tel que l’on souhaite en sortant des choix binaires habituels “homme/femme”. Ou encore dans Forza Horizon V avec la possibilité de mettre à son personnage des prothèses. Et pour finir, Overcooked qui permet aux personnes en fauteuil roulant de se reconnaître et s’identifier au Chef Racoon lui-même dans son fauteuil (mon personnage pref que je sélectionne tout le temps d’ailleurs).
Il y a de nombreux autres sujets que je ne peux malheureusement pas aborder dans cet article – au risque de le transformer en livre – comme le fait de modifier les contrôles du jeu, d’adapter le gameplay et le HUD pour les malvoyants ou les sourds, les aides à la navigation ou les options pour la “motion sickness” etc. Il existe de nombreuses vidéos (dont celles de GMTK) et articles ou sites internet (dont celui de Xbox avec ses règles sur l’accessibilité) que je vous mets en bas de l’article pour celles et ceux qui souhaiteraient tout le détail. Mais ce qu’il faut retenir, c’est que ça évolue et qu’il y a de plus en plus de règles de bonnes conduites identifiées que les studios se mettent à suivre.
Cependant même si toutes ces règles à respecter sont bien identifiées désormais, les contraintes des studio entrent tout de même en jeu et c’est bien plus compliqué que ça.
III. Les contraintes des studios
PARCE QUE OUI ! Il y a des contraintes qui sont importantes à rappeler. Je dis ça parce qu’avant d’être dans l’industrie, j’avais la fâcheuse tendance à faire l’inspecteur des travaux finis et ma phrase favorite était “mais pourquoi ils ont pas pensé à ça ? C’était pourtant évident !” – mais parce qu’ils ont pas budget ou de temps illimité ma petite !
Bien que le sujet soit de plus en plus populaire et qu’il ait sa place au sein du game design, l’accessibilité, l**’inclusivité** et l’utilisabilité (UX) ne sont pas toujours prioritaires. Et ce pour deux raisons :
▶️ L’expérience du jeu
Les Game Designers ont une ambition définie pour le jeu : qu’il soit cosy et chill, qu’il soit challengeant, qu’il soit effrayant etc.
Le problème avec l’accessibilité, c’est que sa nature même réside dans le fait de rendre tout jeu accessible à toujours plus de monde, et donc dans la majorité des cas de modifier l’expérience désirée.
Pour prendre l’exemple de The Last of Us, l’expérience désirée étant basée sur la violence et le traumatisme, l’objectif était de créer une ambiance tendue et inconfortable. Créer une option d’accessibilité pour rendre le jeu plus simple, les ennemis plus indulgents ou moins agressifs, afficher des effets sonores, simplifier l’inventaire, c’est impacter cette expérience désirée. Mais ils ont trouvé des compromis.
Et certains jeux y sont réticents. C’est le cas par exemple de Sekiro : Shadows Die Twice [2019] qui a évoqué le fait d’inclure un mode facile dans le jeu pour permettre à plus de joueurs.euses de profiter de l’histoire sans le côté très punitif. Malheureusement, des fans s’en sont plaint et refusaient de voir Sekiro proposer un mode facile malgré les demandes des défenseurs de l’accessibilité. Le studio a du coup été contraint de ne pas ajouter cette option par peur de décevoir les fans…
▶️ Le budget et le temps
Deux autres contraintes qui entrent en jeu, ce sont le budget alloué et le temps de production.
Le temps et l’argent sont deux contraintes qui forcent la production à faire des choix. Et bien que l’accessibilité soit prise en compte et fasse entièrement partie des process de réflexion du game design (c’est le cas dans le studio dans lequel je travaille), souvent lorsqu’il faut prioriser entre une mécanique du jeu ou une option d’accessibilité poussée, c’est la mécanique du jeu qui est priorisée. Et la raison est simple : s’il y a de l’accessibilité sans pour autant avoir une mécanique pour laquelle cette option d’accessibilité servira, c’est inutile. Et c’est le même problème avec l’UX design : à quoi bon faire un onboarding extrêmement qualitatif s’il onboarde des mécaniques… Inexistantes ?
Il me semble important et primordial en ces temps de rappeler que même avec toute la bonne volonté du monde, sans budget ni temps illimité, c’est compliqué de respecter toutes les règles – même s’il est crucial de les avoir en tête et de viser la meilleure application possible de celles-ci.
Par exemple, The Last of Us 2 qui a fait des prouesses en termes d’accessibilité avec une multitude d’options, des preset rapides pour les handicaps visuels, moteurs ou auditifs, c’est plus de cinq ans de développement avec 2100 personnes. C’est beaucoup.
Ca ne veut pas dire qu’il ne faut pas pousser le sujet ! Au contraire : plus on en parle plus le milieu évolue. Il faut juste garder en tête que tout ne peut pas radicalement changer du jour au lendemain, mais que ça évolue.
IV. Un avenir prometteur ?
Malgré des contraintes studios ou une communauté de joueur.euses parfois un peu trop réticente, le futur de l’accessibilité, inclusivité et utilisabilité dans le jeu vidéo reste plus que prometteur !
Microsoft Xbox met à disposition des règles d’accessibilité, des controllers accessibles ; et Sony se met à suivre son concurrent en mettant à disposition un site listant les options d’accessibilité de chacun de ses titres, ça annonce la couleur.
Il y a même de vraies collaborations qui se font entre les studios et les communautés marginalisées pour avoir leur retour directement et pouvoir designer en fonction de leurs besoins, et des awards dédiés à l’innovation dans l’accessibilité.
La diversité au sein des jeux est aussi extrêmement importante et donne un souffle de renouveau pour l’industrie en racontant des histoires qui sortent du cadre habituel ou adoptant de nouveaux codes, changeants de ceux déjà vus et revus. La diversité nous permet à toutes et tous d’avoir la chance de se reconnaître dans un personnage jouable. Les différentes fonctionnalités d’accessibilité nous concernent aussi toutes et tous et offrent des options de personnalisation qui s’adaptent à tout le monde, de la personne au bras cassé et ne pouvant plus jouer qu’à une main pendant un certain temps, à la personne aveugle, passant par tous les autres types de handicaps.
En bref, l’accessibilité, l’inclusivité et l’utilisabilité, ce sont trois objectifs qui nous concernent tou.te.s et permettent au plus grand monde de profiter des jeux vidéo. Et c’est beau !
Quelques pistes de réflexion
- *Web accessibility Initiatives : https://www.w3.org/WAI/fundamentals/accessibility-intro/fr*
- *Game Accessibility Guidelines : https://gameaccessibilityguidelines.com/basic/*
- *Accessibility myths : https://a11ymyths.com/*
- *SIG Top Ten: https://igda-gasig.org/how/sig-top-ten/*
- ***Can I play that : https://caniplaythat.com/***
- *Xbox accessibility guidelines : https://learn.microsoft.com/en-us/gaming/accessibility/guidelines*
- Vidéos de GMTK pour chaque type de handicap :